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Changements climatiques : Les agriculteurs du Haut Atlas Oriental s’interrogent ?

(19/01/2011)

Au moment où la communauté internationale débattait sur des questions relatives au réchauffement planétaire et aux problématiques des émissions des gaz à effet de serre au Mexique, le Maroc a connu des précipitations ayant donné espoir aux agriculteurs qui les attendaient impatiemment pour pouvoir démarrer la campagne agricole dans de bonnes conditions. Ces précipitations ont malheureusement occasionné des inondations à l’origine de dégâts importants dans plusieurs villes du pays et notamment à Casablanca où la hauteur de pluie a dépassé 170 mm pendant 24 heures. Les perturbations atmosphériques ayant marqué le mois de décembre ont également touché plusieurs pays d’Europe. La France à titre d’exemple a connu une vague de froid sans précédent, accompagnée de très fortes chutes de neige. Plusieurs pays ont connu pendant les dix dernières années des catastrophes naturelles ayant fait plusieurs morts et dévasté des régions entières. Tout le monde est conscient que le déséquilibre écologique auquel s’affronte actuellement l’humanité s’explique par le réchauffement de la planète : la fonte des glaciers, l’augmentation des niveaux des mers, des inondations, des incendies de forêts, etc. Cycles déséquilibrés Les populations des montagnes du Haut Atlas Oriental l’ont déjà constaté depuis une quinzaine d’années ou plus. En effet, tout le monde a pu remarquer les changements, pour ne pas dire les perturbations, des conditions climatiques accompagnant chaque saison de l’année. On parle ainsi d’hivers doux. Au lieu de recevoir de la neige, les régions d’altitudes ont plutôt reçu de la pluie. Cette année lors des récentes perturbations du mois de décembre, le village d’Imilchil situé à 2250 m d’altitude a reçu 7mm de pluie le 3 décembre, alors qu’il neigeait souvent dans cette région depuis la fin du mois d octobre. La production des arbres fruitiers (les rosacées en particulier nécessitant un certain froid pour pouvoir produire des fruits) se trouve affectée par insuffisance de froid hivernal. Les populations souffrent d’une année à l’autre des dégâts occasionnés par les crues des oueds qui emportent des milliers de tonnes de productions et de terres agricoles. Plus de 100 tonnes de pommes de terre se perdent ainsi chaque année dans la vallée de l’Assif Melloul à cause des débordements de l’oued sur une longueur de 50km. Le patrimoine sol arraché aux agriculteurs engendre l’exode et contribue à l’envasement des barrages. Les éleveurs transhumants perdent chaque année des milliers de têtes de bétail à cause des intempéries. Floraison perturbée Si l’année dernière le phénomène de la floraison précoces des palmiers dattiers accompagné des coassements de grenouilles au mois de décembre a attiré l’attention des agro écologistes (les agriculteurs n’ayant pas récolté de dattes à partir de ces arbres), cette année ce sont les amandiers qui fleurissent prématurément. En effet, en tournée dans la région d Amellagou relevant de la Province d Errachidia, des agriculteurs me demandaient des explications sur la question de la floraison de quelques amandiers. Sur certains, on a pu observer une floraison depuis le 5 décembre 2010. Les arbres ayant fleuri ont été repérés dans les villages d’Imider et Lahroune où le taux de floraison au niveau d’un seul arbre, selon M. Moha Belkacem technicien agricole, a dépassé les 10%. Ce phénomène provoque la curiosité des agriculteurs qui en parlent et s’interrogent sur ses origines. Moha Ou Ali OUSRI agriculteur âgé de plus de 80 ans m’a précisé que c’était la première fois de sa vie qu’il voyait fleurir un amandier en cette période de l’année. Et d’ajouter que les hivers deviennent de plus en plus doux dans la région d’Amellagou située à 1400m d’altitude. Selon cet agriculteur, il y a vingt ans, en hiver, les canaux d’irrigation étaient toujours pris par des glaces pendant la nuit, ce que l’on n’observe plus ces dernières années. « Un déséquilibre écologique a dû affecter les quatre saisons en accentuant les écarts de températures journalières » ajouta t il. Il est à rappeler que la région d’Amellagou/Assoul est connue comme zone de production des amandes par excellence au niveau de la province d’Errachidia. Avec un effectif total de 21.000 pieds produisant environ 210 tonnes d’amandes (ORMVA de Tafilalet), l’amandier est conduit d’une manière traditionnelle et est constitué généralement de peuplements de semis qui présentent une grande diversité phytogénétique et une hétérogénéité préjudiciable à la qualité commercial du produit. La culture d’amandier joue un rôle socio économique important au niveau de cette région. Elle contribue à la création d’opportunités d’emploi pour les jeunes ruraux et génère une valeur commerciale importante aux agriculteurs qui vendent la quasi-totalité de leur production aux intermédiaires aux mois de juin-juillet. Hrou ABOUCHRIF, hrou.abouchrif@gmail.com

Source : Agriculture du Maghreb