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Le Maroc peut mieux faire

(01/11/2009)

Deuxième exportateur mondial d’olives de table, le Maroc jouit d’une position nettement avancée. Avec une production relativement importante et destinée principalement à l’export, les olives de table marocaines sont écoulées facilement sur les marchés étrangers. Cependant, le potentiel de production n’est pas complètement valorisé. Les opérateurs commencent déjà à se plaindre de certains problèmes d’approvisionnement, avec une concurrence appelée à s’accentuer dans l’avenir. Le Maroc dispose d’un fort potentiel oléicole qu’il faut valoriser. Il pourrait mieux faire !

Khalid KHERRAF
 

La quantité d’olives de tables produites au Maroc oscille entre 80 et 120.000 tonnes par an avec une moyenne de 96.000 tonnes sur les 5 dernières années. Ce potentiel confère au pays un emplacement privilégié parmi les principaux pays producteurs d’olives de table, à savoir la Syrie, l’Egypte qui a pu améliorer son potentiel de production durant ces dernières années, et l’Union Européenne, dont l’essentiel de la production provient de l’Espagne. Côté export cette fois-ci, le Maroc occupe une position beaucoup plus avancée. En effet, il est le deuxième exportateur mondial devant l’Espagne avec 80% de la quantité produite destinée à l’export. Selon les statistiques de l’Etablissement Autonome de Contrôle et de Coordination des Exportations, ce sont 65.000 tonnes d’olives de table qui ont été exportées durant la campagne précédente pour une valeur de 1,17 milliards de Dirhams. A noter que la principale destination des olives de table marocaines demeure l’Union Européenne, qui représente 70% du marché.

 

Un potentiel oléicole mal valorisé face à des problèmes d’approvisionnement qui persistent !

L’olive de table est donc un produit phare pour le Maroc. Cependant, ces chiffres cachent certaines lacunes. Premièrement, les plantations oléicoles, qui représentent à peu près 54% des superficies arboricoles du pays, soit environ 590.000ha, ont un faible niveau de production avec des rendements largement inférieurs à ceux des autres pays oléicoles. En fait, le vieillissement des vergers, l’extension limitée des superficies oléicoles et les techniques culturales traditionnelles ne permettent pas de valoriser le potentiel oléicole du pays. Autre facteur limitant, l’essentiel des olives récoltées est destiné à la trituration. Rachid Alaoui, Directeur Général de la société Sesta, opérateur dans le secteur de la conserve des olives de table et filiale du groupe Bicha, souligne que 70% de la récolte nationale des olives, qui ne dépasse pas les 450.000 tonnes, est destinée à la trituration. « Avec 10% de perte, il ne reste que 20% qui sont destinées aux unités de transformation. Sur ces 20%, des quantités non négligeables sont commercialisées en état frais sur le marché », ajoute-t-il. Des facteurs de blocus qui rappellent toujours le problème d’approvisionnement, commun à l’ensemble des produits agroalimentaires, qui fait peiner la totalité des opérateurs agro-industriels marocains. Pire encore, les pertes sous forme d’écarts de triage (petits calibres, fruits endommagés ou piqués par des insectes...) sont considérables. Selon Mohammed El Khaloui et Abderrahim Nouri, professeurs chercheurs à l’Ecole Nationale d’Agriculture de Meknès (ENA), ces pertes peuvent atteindre 30% du tonnage traité, alors qu’elles sont inférieures à 10% dans d’autres pays oléicoles. A noter que les opérateurs de la filière de conserve des olives de table ne dépassent pas une quinzaine et que la plupart d’entre eux se dirigent vers les agriculteurs pour assurer leur approvisionnement en restant très loin de l’organisation en unités intégrées. L’absence de structures de transformation intégrées pose problème au niveau de la sécurisation de l’approvisionnement et de la qualité de la matière première. « Pour se doter des olives de meilleure qualité, nous sommes obligés de passer par les souks pour réaliser notre approvisionnement. Nous déployons des efforts énormes pour veiller à la bonne qualité lors de l’achat de la matière première, transport et stockage », précise Rachid Alaoui. « Ces mesures pèsent fort sur la productivité des industriels, surtout face à un marché d’approvisionnement mal organisé et avec certains opérateurs qui travaillent dans l’informel et qui mènent une concurrence déloyale », ajoute-t-il. En fait, pour s’octroyer des olives aptes à la conservation, un ensemble de mesures sont à respecter. Parmi les critères de choix des olives fraîches destinées à la conserve, l’absence de toute attaque parasitaire, une forme de préférence sphérique et arrondie pour répondre aux exigences de dénoyautage, un rapport pulpe/noyau élevé et une bonne texture pour résister aux traitements industriels.

 

Garder sa position dans le marché, c’est fournir des efforts

Le Maroc, deuxième exportateur mondial d’olives de table, garde sa position dans les marchés internationaux car le produit s’écoule facilement dans diverses destinations. « Nous écoulons facilement nos produits dans les marchés étrangers, mais nous souffrons quand même de la concurrence espagnole », indique Rachid Alaoui. En fait, bien qu’elle ne soit pas rude, la concurrence pourrait s’intensifier, surtout avec l’émergence de certaines potentialités, comme l’Egypte qui est arrivé à booster sa production ces dernières années et a commencé à exporter massivement depuis 3 années. En effet, durant la campagne précédente, l’Egypte a produit 432.000 tonnes d’olives de table, dont 110.000 tonnes destinées aux marchés étrangers.

Pour mieux garder sa position dans le marché international, le Maroc doit fournir des efforts en matière d’amélioration du potentiel de production des olives ainsi que d’organisation des circuits d’approvisionnement des industriels. Rachid Alaoui signale dans ce sens que le rendement de l’olivier doit être amélioré à travers la modernisation des techniques culturales et le rajeunissement des plantations. Plusieurs efforts ont été déployés pour améliorer les techniques de conduite culturale de l’olivier, mais restent faiblement vulgarisées. Ainsi, plusieurs projets de recherche ont été conduits pour améliorer les procédés d’élaboration des olives de table, surtout avec les travaux réalisés à l’ENA, sauf que les industriels n’ont pas pu bénéficier de ces acquis, faute de collaboration entre le chercheur et l’industriel. Rachid Alaoui explique dans ce sens qu’il y a eu des recherches académiques considérables qui ont abouti à de bons résultats, mais qui ne sont pas mis en valeur sur le terrain. « L’industrie devrait alimenter la recherche et le chercheur devrait orienter l’industriel », conclut-il.

En somme, le Maroc a encore un beau potentiel de développement de la production d’olives de table. Les techniques pouvant améliorer le rendement de l’olivier existent et les acquis de la recherche-développement sont disponibles. Ainsi, le Plan Maroc Vert s’est articulé sur l’agrégation dans sa stratégie et il a accordé une attention particulière à l’accroissement de la production oléicole. Toutes les conditions sont réunies pour permettre la consolidation de la filière des olives de table. Qu’attend le Maroc pour booster encore plus son positionnement sur les marchés internationaux ?!

 

 

 

Source : FOOD magazine