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Nourrir le Monde

(01/10/2010)

Comment nourrir neuf milliards d’individus dans 40 ans alors que l’on a du mal à en nourrir 6,8 milliards aujourd’hui ? La réponse se trouve peut-être dans la science de demain et dans la sagesse d’hier.

L’an dernier, un rapport de la FAO a révélé que le nombre de personnes sous-alimentées avait dépassé la barre d’un milliard, une information inquiétante pour la planète. Ce chiffre devrait augmenter car, selon les prévisions, la population mondiale devrait s’élever à neuf milliards en 2050. Pour nourrir toutes ces bouches supplémentaires, la FAO estime que la production alimentaire doit augmenter de 70%.
Parviz Koohafkan, directeur de la division terre et eau de la FAO, estime que la production de cette nourriture supplémentaire n’est pas un problème. « Nous pouvons y parvenir avec les terres, l’eau et les technologies disponibles. La question est plutôt de savoir où produire, comment le faire et comment acheminer la nourriture aux personnes qui ont faim » a-t-il déclaré.
Alors que la Révolution verte du 20e siècle a considérablement amélioré le rendement des sols et a sauvé des millions d’êtres humains de la faim, elle s’est avérée non durable dans de nombreuses
régions du monde. La pollution des sources d’eau peut créer des zones mortes dans les cours d’eau.
L’excès d’irrigation mène à la salinisation et à l’hydromorphie, et la biodiversité souffre en raison de la concentration sur quelques cultures à haut rendement. L’usage à outrance du labourage, de l’irrigation, des engrais et pesticides chimiques font chuter le taux de croissance de la production agricole.
Pour certains observateurs, la solution pour nourrir la population consiste en une utilisation plus étendue des technologies de production, véhicules et équipements modernes. Aux Etats-Unis, l’administration Obama voit une réponse dans les biotechnologies. « Nous pensons que la biotechnologie a un rôle pivot à jouer dans la hausse de la productivité agricole, en particulier compte tenu du changement climatique », a déclaré la secrétaire d’état Hillary Clinton lors d’une téléconférence en 2009.
En attendant, Farming First (regroupement mondial d’organisations agricoles), appelle, d’une part, à une utilisation accrue des technologies de l’information pour donner accès aux agriculteurs aux alertes météorologiques et du marché, et, d’autre part, à une amélioration des transports et des chambres froides pour éviter les pertes pendant et après les récoltes.
Mais une démarche plus écologique est également une solution pour l’agriculture de demain. Parviz Koohafkan estime que des investissements dans l’agriculture à petite échelle seront nécessaires pour obtenir au niveau local la sécurité alimentaire d’une population mondiale en hausse. Pour souligner l’importance de l’agriculture familiale et traditionnelle, il promeut le programme Systèmes ingénieux du patrimoine agricole mondial (SIPAM). Celui-ci vise à identifier et gérer durablement des systèmes agricoles uniques développés pendant des centaines, voire même des milliers d’années, tels que la riziculture en terrasses des Philippines, le système pastoral masaï en Afrique de l’est, et les citronneraies du sud de
l’Italie.
Ces systèmes ont été développés pour faire face aux besoins des communautés qui vivent dans des écosystèmes fragiles, explique Parviz Koohafkan. Dans quasiment chaque pays, il existe une sorte de patrimoine agricole unique, mais nos politiques agricoles actuelles ne soutiennent pas ces systèmes.
Ces milieux fournissent de la nourriture et une source de revenus à la population locale, mais assurent également de magnifiques paysages, une riche biodiversité et un instrument de mesure à l’adaptation au changement climatique et à son atténuation. Il y a des valeurs inhérentes à ces systèmes que l’on doit conserver, non seulement pour nourrir plus d’un milliard d’affamés dans le monde, mais également pour préserver les ressources naturelles et notre environnement.
Parviz Koohafkan est actuellement directeur de la division terre et eau, et coordinateur des Systèmes

SIPAM

 Le programme Systèmes ingénieux du patrimoine agricole mondial de la FAO vise à identifier et à gérer durablement des systèmes agricoles uniques, tels que la riziculture en terrasse
des Philippines, le système pastoral masaï en Afrique de l’Est et les citronneraies du sud de
l’Italie.ingénieux du patrimoine agricole mondiale (SIPAM) de la FAO.

Source : Agriculture du Maghreb