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Le chocolat amer

(12/07/2011)

Tout commence en 2002, lorsque le journaliste néerlandais Teun van de Keuken découvre dans son quotidien favori un petit article, parlant d’enfants vendus dans des marchés aux esclaves pour récolter les fèves de cacao, essentiellement en Côte d’Ivoire, premier producteur mondial avec 40% du total (1,4 millions de tonnes). Plusieurs études et rapports dénoncent l’exploitation des enfants : - The International Institute of Tropical Agriculture : 284 000 enfants (dont 34% vont à l’école), de moins de 14 ans, travaillant dans les fermes de cacao de l’Afrique de l’ouest (cueillette des cabosses, l’extraction des graines à l’aide de la machette, le déplacement de charges très lourdes et l’application de pesticides). - En 1998, l’UNICEF : résurgence du travail des enfants dans le filière cacao ivoirienne. - En 2000 l’US State Department : 15 000 enfants de 9 à 12 ans enlevés et obligés de travailler dans le coton, le café et le cacao en Côte d’Ivoire. - En 2001, l’OIT : Plus de 200 000 enfants et adolescents (15-17 ans) sont concernés, incluant l’Afrique centrale. Durant des années, l’industrie du chocolat a prétendu cyniquement n’être pas responsable de la situation des travailleurs du cacao - sauf qu’elle paye leur production à vil prix ! – et en 2001, elle signe le protocole Harking-Engel (resté lettre morte) qui vise, entre autres, à créer une certification indépendante, assurant aux consommateurs que le cacao utilisé ne provient pas du travail des enfants. Consommateur complice d’esclavage Pour faire bouger les choses, le journaliste néerlandais a une idée : se faire condamner par la justice, en tant que consommateur de chocolat, pour complicité d’esclavage ! L’article 46 du code pénal des Pays-Bas stipule en effet qu’acheter un bien dont on sait qu’il est issu d’une activité criminelle est passible de 4 ans de prison, et l’esclavage est criminel. En mars 2004, en s’accusant lui-même, il saisit le parquet néerlandais. “Si je suis jugé coupable de ce crime, tout consommateur de chocolat pourra ensuite être poursuivi. J’espère que les gens arrêteront alors d’acheter du chocolat, ce qui affectera les ventes des grandes entreprises et les obligera à faire quelque chose à propos de ce problème“, explique-t-il. Le parquet rejette la compétence des tribunaux, jugeant que van de Keuken n’a aucun lien direct avec ce secteur. Tony entre dans le business En conséquence, il s’est lancé dans la commercialisation de chocolat “slave free” (sans esclave), sous la marque de Tony’s chocolonely. Les 500 premières tablettes sont parties en une journée, se vante-t-il. Nous sommes au XXIème siècle. L’esclavage est archaïque !” Avec ses arguments juridiques qui semblent pertinents, le trublion agitateur pourrait bien devenir une épine dans le pied de la puissante industrie du chocolat. Mondialisation.ca

Source : Agriculture du Maghreb