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Les plantes

(17/10/2012)

Ces potentielles mines d’emploi

La filière des plantes médicinales peut-elle devenir un levier de développement pour le Maroc ? On le croit fortement à l’INPMA (Institut National des Plantes Médicinales et Aromatiques). Le Maroc dispose d’un patrimoine riche et diversifié, mais son marché est alimenté de produits à haute valeur ajoutée importés de l’étranger, tandis que le Royaume exporte ses plantes à l’état brut. Une situation qu’il faut changer, et qui est au coeur de l’action du projet européen MAP2ERA, dont l’objectif est de renforcer la recherche internationale et la coopération entre l’INPMA et l’Espace Européen de Recherche.

L’utilisation des plantes dans la médcine est aussi vieille que la médcine elle-même. Et au jour d’aujourd’hui, dans sa recherche de nouveaux produits ou traitements, l’industrie pharmaceutique continue à puiser dans les composantes naturelles. Le Maroc dispose d’un patrimoine de plantes aromatiques et médicinales (PAM) riche et diversifié : 4.200 espèces,
dont 800 endémiques. Le pays est 12ème exportateur mondial. Et ses exportations de PAM ont augmenté de 100% au cours de la période 2004- 2009. Une richesse extraordinaire, dont le Maroc doit pouvoir tirer profit au maximum. L’Europe est en train de le soutenir dans ses efforts. MAP2ERA est financé par la Direction Générale de la Recherche et Innovation de la Commission Européenne. L’objectif central de MAP2ERA est de renforcer la coopération
internationale dans le domaine de la recherche, en particulier entre l’Institut National des Plantes Médicinales et Aromatiques (INPMA) et l’Espace Européen de la Recherche, ERA. C’est le premier projet européen coordonné par une université marocaine, en l’occurrence
l’INPMA, l’institut le plus important du Maroc dans la recherche sur les plantes aromatiques et
médicinales. « Cette université a été créée dans une commune rurale avec comme objectif principal la recherche et le développement », explique le Directeur de l’INPMA et coordonnateur du projet MAP2ERA, Abdessalam El Khanchoufi. « Le but de l’INPMA est donc de valoriser l’utilisation marocaine des plantes médicinales, aider à l’organisation de la filière, l’intégrer dans le domaine économique et en faire ainsi un levier de développement par la valorisation et
la conservation de la flore médicinale aromatique marocaine », poursuit-il avec passion. Même son de cloche chez le personnel de l’INPMA, dont Abdelmalek El Mekaoui, enseignant chercheur en phytobiotechnologies : « le marché marocain est alimenté de produits à haute valeur ajoutée importés de l’étranger et en même temps, le Maroc exporte ses plantes à l’état brut. C’est cette situation qu’il faut changer », tonne le chercheur.

Les entreprises surprises par les opportunités
MAP2ERA vise principalement la mise en place d’un réseau de partenaires et la formation technique, scientifique, administrative et réglementaire du personnel de l’INPMA. Le projet implique l’Institut de Chimie des Substances Naturelles (ICSN), dépendant du prestigieux Centre National de Recherche Scientifique français (CNRS), mais aussi la société allemande GIRAF et l’Université d’Alicante en Espagne. MAP2ERA a permis à l’INPMA d’intégrer l’Espace
Européen de la Recherche et de diversifier ses sources de financement. L’INPMA a pu ainsi mieux répondre aux attentes de ses interlocuteurs : citoyens, agriculteurs, industriels du
médicament, organisations professionnelles, ministère de tutelle… La rencontre entre chercheurs et entrepreneurs à la recherche d’opportunités offertes par le monde de la science, est une des activités mises en place dans le cadre du projet : l’INPMA et l’ICSN-CNRS - en
collaboration avec l’Agence Nationale pour la Promotion de la Petite et Moyenne Entreprise (ANPME) – ont récemment organisé une manifestation internationale à Fès. « Nous avons ramené des entreprises qui ont été surprises et aussi satisfaites par les opportunités offertes par ces assises », explique Houria Nadifi, Chargée de coopération au sein de l’ANPME. Parmi les organismes présents, des associations à la recherche de solutions pour augmenter les
opportunités de travail des populations. « Je travaille pour un projet de restauration écologique des sites dégradés, que ce soit d’anciens sites miniers, de carrières de gravats etc.», explique Miguel, qui travaille pour une association espagnole. « Il se trouve que nous opérons dans des
régions qui sont également des viviers de plantes. Nous pensons que ce secteur peut être un pôle de création d’emploi. »


L’introduction de nouvelles plantes à la place des cultures illicites
L’INPMA est un établissement universitaire fonctionnel depuis 2005. Il reçoit des étudiants doctorants et des stagiaires niveau master et licence ainsi que des étudiants dépendant
des ministères. L’INPMA a une capacité d’accueil de 28 étudiants et de 30 personnes du staff (enseignants, chercheurs, ingénieurs, techniciens et personnel administratif). En plus de ce volet recherche appliquée, l’Institut fait également de la formation continue destinée aux pharmaciens, médecins ou toute personne concernée par la filière, couronnée par un diplôme
d’université ou certificat. L’INPMA s’occupe également de la formation et de l’encadrement des
coopératives et associations qui travaillent dans le domaine des plantes.

Des associations dont les membres sont en majorité des femmes. « Nous avons l’ambition de créer des projets générateurs de revenus pour la femme et la fille rurales », insiste M. Khanchoufi. Et d’ajouter : « nous sommes dans une zone d’extension des cultures illicites. L’introduction de nouvelles plantes, comme la verveine ou le myrte, permet une substitution
de ces cultures. » Si le programme MAP2ERA est un franc succès, tout n’est pas si rose pour l’Institut. Il faut répondre aux besoins des étudiants dans un pays comme le Maroc où la recherche reste encore secondaire. L’Institut ne dispose pas d’un statut spécial et ne peut pas faire de la contractualisation. « Nous avons besoin de postes doctorants et il faut nous donner la latitude de créer des entreprises à l’intérieur de l’Institut. Nous disposons de 65 hectares pour le jardin expérimental et de 18 hectares d’une ferme expérimentale que l’on ne peut pas exploiter faute de moyens », déplore le Directeur de l’Institut. Pourtant, l’INPMA - qui a élaboré
cinq axes de recherche - compte pour presque la moitié des brevets déposés par l’Université Sidi Mohamed Ben Abdellah. Une expérience pilote prometteuse dont les enseignements pourraient également nourrir la réflexion plus générale menée sur les politiques de recherche et innovation dans le cadre national ainsi que dans le cadre du dialogue bilatéral UE-Maroc
sur la coopération en recherche et innovation.

 

Source : FOOD magazine