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Industrie agro-alimentaire : Ces freins qui plombent le secteur

(15/04/2010)

En comparant le Maroc à six autres pays, une étude réalisée pour le compte de la FENAGRI et financée par l’UE dresse un tableau des boulets qui compromettent l’émergence d’une industrie agro-alimentaire marocaine forte et compétitive.

                                                                                                         Nabil TAOUFIK

Trop de freins. L’industrie agroalimentaire marocaine fait face aujourd’hui à trop de freins qui l’empêchent de s’épanouir et de croître. Plus qu’un sentiment d’industriels en mal de compétitivité, c’est le constat dressé par une étude objective. Il s’agit d’une étude réalisée pour le compte de la Fédération Nationale de l’Agro-Industrie (FENAGRI) et financée par l’Union Européenne (UE) dans le cadre du Programme d’Appui aux Associations Professionnelles (PAAP). Des freins, on peut en recenser essentiellement quatre : fiscal, douanier, normatif et réglementaire, l’éducation et la formation. Pour le volet fiscal, l’étude montre que le Maroc est systématiquement le pays qui taxe le plus ses entreprises agroalimentaires. Le comparant à six autres pays (France, Espagne, Turquie, Egypte, Tunisie et Chili), l’étude relève que quel que soit le type d’impôt (IS, TVA, etc) le Maroc est le moins compétitif. Cette situation entraîne deux distorsions : d’un côté, elle pénalise les entreprises structurées et transparentes et pousse, de l’autre côté, à la prolifération de l’informel privant les caisses de l’Etat d’entrées considérables. Cela sans parler du signal négatif envoyé aux investisseurs étrangers mettant le Maroc parmi les moins compétitifs de la région Euromed. L’outil fiscal intervient également au niveau de la différenciation au niveau de la TVA appliquée au secteur agricole et celle appliquée à l’industrie agro-alimentaire. L’écart est de 0 à 20% (0% sur les produits agricoles et 20% pour les produits industrialisés). Cette situation n’encourage pas à transformer les produits de l’agriculture et, en conséquence, n’incite pas au  développement de la branche agroalimentaire. Dans les pays benchmarkés, l’écart est de 0 à 2 à 3%. En Espagne par exemple, il n’y a pas de différence entre les TVA appliquées aux deux secteurs ; le taux est le même : 7%.
Le deuxième frein concerne les droits de douane appliqués aux produits agricoles. En effet, face à une situation d’insuffisance de la production agricole nationale, les industriels se voient obligés de recourir à l’import de la matière première. Mais, étant donné que le Maroc a fait le choix de protéger le secteur agricole, les droits de douanes sont à un niveau prohibitif rendant le produit fini non compétitif. Parallèlement et paradoxalement, les produits finis importés en provenance de certains pays entrent en franchise de douane ce qui fragilise doublement le produit agroalimentaire marocain. Quant au volet normatif et réglementaire, les professionnels expriment, à travers la FENAGRI, le souhait de voir les normes de qualité et d’hygiène plus exigeantes notamment à travers la généralisation de la norme HACCP. Mais, précisent-ils, « le même niveau d’exigence devrait être appliqué à tous les intervenants de la chaîne : industriels, importateurs, grossistes, détaillants… et non pas seulement aux seules entreprises marocaines transparentes ». Cela permettra de mettre sur un même pied d’égalité tous les intervenants et assurera une meilleure protection du consommateur.

Formation, R&D…les professionnels appelés s’impliquer davantage

L’étude affirme qu’« en matière de formation, les industriels ne participent pas efficacement au pilotage des structures en charge de l’enseignement et de la formation pour orienter ces entités dans le sens désiré et qui réponde à leurs besoins » et ce, bien que, « les lois et règlements régissant les structures d’enseignement et de formation et même de recherche
donnent une place et confèrent un rôle important aux associations professionnelles ». Mais, malheureusement, cette brèche n’est pas exploitée par les professionnels. Pis, « très souvent, il s’agit de participation à titre personnel et manquant dans la plupart des cas de continuité et par conséquent sans grand effet ». Du côté de la profession, ce manque d’implication est expliqué par « la confiance perdue à cause de la faillite du système des CSF (Contrat spéciaux de formation) ainsi que par le fait que les professionnels n’aient pas la capacité effective d’évaluer ou de changer la formation, professionnelle notamment ». Quant à la R&D, la FENAGRI semble miser gros sur la redynamisation du rôle du Centre Technique des Industries Agroalimentaires (CETIA) notamment à travers l’assurance de ressources pérenne (voir interview ci-après)

Source : FOOD magazine