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Marché des produits laitiers: Un potentiel de croissance très fort

(15/05/2010)

Avec seulement 32 litres de lait consommés par habitant chaque année, le Maroc se place parmi les pays où l’on consomme le moins ce produit et ses dérivés. Le revers de la médaille recèle une marge de croissance très importante pour les opérateurs. Les yaourts light et du 0% ainsi que les demi- écrémé et écrémé se dégagent comme étant les segments les plus porteurs.

                                                                                                  Nabil TAOUFIK

Avec un chiffre d’affaires annuel de plus de 10 milliards de DH, un rythme de croissance de 7,6% en moyenne sur les cinq dernières années et surtout une moyenne annuelle de 16% de croissance pour les produits dérivés sur les cinq dernières années, le marché des produits laitiers au Maroc présente des opportunités d’affaires considérables. Néanmoins, c’est un marché qui demeure assez oligopolistique avec l’existence d’un nombre limité d’offreurs à taille significative (7 au total) et où deux entreprises détiennent à elles seules plus de 76% des parts de marchés. Ainsi, selon les chiffres du cabinet d’études Nielsen, Centrale Laitière est le leader incontesté avec 58,7% de parts de marché du lait. Une situation due à un héritage historique qui a fait de l’entreprise le premier fournisseur de lait au pays notamment après l’indépendance. Cette position s’est notamment renforcée par l’alliance scellée depuis 1953 avec le leader mondial Danone entré au capital du groupe ONA dans les années quatre-vingt. Ce dernier est majoritaire avec plus de 55% du capital tandis que la part de Danone est de plus de 29%. Mais la lune de miel entre les deux mastodontes risque de ne pas trop durer. En effet, avec la création de Yaoumi, d’abord un nouveau produit, devenu par la suite une marque à part entière (reléguant au passage le logo Danone à l’arrière plan), Centrale Laitière serait en train de se préparer à un éventuel après-Danone. C’est une question qui ne serait pas d’actualité aujourd’hui mais qui reste probable. Loin derrière la filiale laitière de l’ONA, arrive la coopérative Copag qui revendique une part de 25%. Créée en 1987, c’est en 1993 que cette coopérative installe sa première unité de transformation du lait. Partie du sud du pays, Copag opère une politique d’expansion très ambitieuse qui lui permettra de devenir le concurrent numéro 1 de Centrale Latière. Une position gagnée grâce à un management visionnaire et un esprit de coopérative bien soudée. Les sociétés Colainord (5,8%), Best Milk (4,4%), Safi Lait (3,5%), Colaimo (3,2%) forment le peloton des suiveurs. Les 6,8% qui restent sont partagés par de petits producteurs ou encore des entreprises d’importations/distributions.

Produits
On distingue deux grandes familles de produits laitiers : le lait d’un côté et ses dérivés de l’autre (yaourt, fromage et beurre). Schématiquement, la quantité produite de lait représente le double de ce qui est en dérivés. Le même schéma de marché vu plus haut pour le lait peut être reproduit pour les autres produits laitiers, notamment les yaourts. Ainsi, on retrouve Centrale Laitière en tête avec 62,8% de part de marché pour les yaourts. Copag est deuxième avec 21,4% tandis que Safi Lait, fraîchement dernier arrivé sur le marché, est troisième avec 3% de part de marché devant Colaimo (2,8%), Domaine Douiet (2,7) et Best Milk (2,6%).
Pour les fromages, la situation est différente. Centrale Laitière n’est pas le leader et Copag est quasi-absent de ce segment compte tenu de sa prestation sur ceux du lait et des yaourts. En tête, on retrouve les fromageries Bel Maroc à travers notamment sa marque planétaire La Vache Qui Rit. Bel Maroc détient ainsi près de 55% de part de marché. Derrière, l’on retrouve les Fromageries Des Doukkala avec 23,1% et Margafrique avec 7,3% de parts de marché ainsi que la société Fromital.

Production
Les quantités de lait et dérivés produites au Maroc avoisinent les 1,2 million de tonnes avec plus de 50% produites par Centrale Laitière.

Consommation
Mais le marocain moyen ne consomme pas beaucoup de produits laitiers. En effet, la consommation du lait et des produits laitiers par habitant reste faible par rapport à d’autres pays comparables (32 équivalent litres de lait/habitant/an contre 52 pour la Tunisie). Cette situation peut être présentée comme une opportunité pour les opérateurs. Un grand potentiel de croissance reste ainsi possible. Toutefois, le marché souffre de beaucoup d’insuffisances aussi bien pour ce qui est de la disponibilité du lait que la difficulté de gérer la haute et basse lactation ou encore la difficulté de garder une régularité des prix vue l’instabilité des prix du marché en amont (forte volatilité du prix de la poudre à l’international et renchérissement des prix des aliments de bétail).

Tendances

Les experts affirment que le consommateur marocain préfère les produits qui ont beaucoup de goût: arômes prononcés, produits sucrés et bien texturés. «C’est ce que montre les études organoleptiques réalisées sur les marocains les 10 dernières années», expliquent Jomana Baraka de Best Milk. Cela a donné naissance à plusieurs adaptations des produits internationaux dont la formule déjà existante est au goût du consommateur marocain. « Toutefois, l’ouverture du consommateur marocain et sa sensibilisation à certaines pathologies est à l’origine de la création du segment des produits allégés » poursuit Jomana. « Ce segment, bien qu’embryonnaire, connait une très forte croissance » confie-t-elle. Il s’agit des segments du light et du 0% MG au niveau des yaourts et du demi- écrémé et écrémé au niveau du lait.

Circuits de collecte : l’informel fait le plein
L’informel est encore très présent dans le processus de collecte du lait. Les colporteurs sont nombreux à taper aux portes des éleveurs. Echappant à tout contrôle sanitaire, ce circuit représentante un grand danger pour la santé du consommateur final. La souplesse des modalités1 de paiement du lait aux éleveurs, l’absence de contrôles inopinés sur la qualité du lait et surtout le passage des véhicules des colporteurs jusque dans les exploitations (ce qui dispense les producteurs de mobiliser du temps de travail pour livrer deux fois par jour le lait) sont autant d’avantages qui poussent les éleveurs à adopter ce système de commercialisation.
En outre, certaines coopératives de collecte de lait qui jouent un rôle très important auprès des éleveurs connaissent de graves difficultés. Leurs dirigeants sont souvent dépassés par l’importance des enjeux techniques (gestion des flux du lait, qualité du produit, systèmes d’informations relatives à leurs activités quotidiennes de collecte). Devant ces difficultés, les adhérents perdent la confiance qu’ils avaient vis-à-vis de leur coopérative et finissent par s’adresser aux réseaux de colportage du lait pour écouler leur produit.

Source : FOOD magazine