La betterave à sucre monogerme

Betterave monogerme

Introduction

La culture de la betterave à sucre occupe annuellement une superficie d'environ 65.000 hectares et permet de produire près de 3 millions de tonnes de racines. Avec la canne à sucre, elle permet la production de près de 500.000 tonnes de sucre, au niveau de 13 sucreries et sucreries raffineries, soit près de 54% des besoins nationaux en consommation de sucre.

Depuis son introduction au Maroc en 1962-63, cette culture a enregistré une augmentation très significative de sa productivité. Cependant, les niveaux des rendements à l'hectare ainsi que la qualité de la matière produite restent en deçà des potentiels atteints dans la plupart des périmètres betteraviers. Aussi, presque la quasi totalité des terres betteravières sont cultivées en semences multigermes.

Les premiers essais d'introduction de la monogerme au Maroc ont eu lieu vers les années 1974-1975. Au cours de ces années, la monogerme fut introduite en tant que variété et non comme une nouvelle technologie; situation qui a abouti inévitablement à l'échec et qui explique que son utilisation reste très limitée malgré les avantages qu'elle offre en matière d'amélioration de la productivité et d'économie de main d'œuvre.

Il est bien admis que quel que soit le potentiel de production d'une variété si celle-ci n'est pas accompagnée de techniques culturales appropriées pour extérioriser sa grandeur génétique, ses performances ne seront jamais atteintes. Ainsi, la mise au point d'un itinéraire technique permettant une bonne préparation du sol, un semis précis et une meilleure protection de la culture s'avère un préalable à toute relance de développement de la betterave monogerme.

Principales contraintes au développement de la betterave monogerme

Les techniques actuelles de préparation du sol et de semis pratiquées dans les différents périmètres irrigués du Maroc ne répondent pas aux exigences des semences monogermes. En effet, le travail du sol est principalement réalisé à la charrue à disques avec un nombre variable de reprises au "covercrop". Ce type de matériel ainsi que les conditions de son emploi dans des sols souvent secs, aboutissent à des lits de semences grossiers caractérisés par une structure très hétérogène et composée de grosses mottes et de terre fine. Cet état d'affinement du sol entraîne une mauvaise qualité du semis, des levées échelonnées se soldant par des peuplements irréguliers et des pertes à la récolte. L'hétérogénéité de la levée réduit l'efficacité des traitements herbicides. De même, le travail du sol à l'état sec nécessite une puissance élevée de traction et use prématurément l'ensemble tracteur-machine.

En ce qui concerne le semis, celui-ci est réalisé soit manuellement sur des billons à des interlignes de 50 à 60 cm et à des espacements entre graines variant entre 16 et 20 cm, soit mécaniquement par des semoirs de précision équipés d'éléments semeurs non adapté aux semences monogermes. Dans le cas des périmètres irrigués en gravitaire, la contrainte principale au développement du semis mécanique est l'inexistence sur le marché national de semoirs de précision capables de semer sur des billons préalablement confectionnés.

En matière de protection de la culture, il est à souligner que dans la majeure partie des périmètres irrigués, l'utilisation des désherbants chimiques et des pesticides est limitée aux grandes exploitations. La cause de cet état étant liée au coût élevé à l'achat de ces produits et à la non-disponibilité de matériel de traitement.

Aussi, la distribution de l'eau selon le système de "tour d'eau" associé parfois, à la non-disponibilité des eaux d'irrigation, constituent une contrainte essentielle au développement de la betterave monogerme. En effet, cette culture requiert lors de son installation des irrigations rapprochées dans le temps, en vue d'assurer la germination et une levée homogène. Ces irrigations rapprochées ne peuvent être assurées par l'irrigation à partir du réseau, qui prévoit des irrigations au moins à 7 jours d'intervalle. Enfin, les terres agricoles du Maroc sont caractérisées par la micro-exploitation et le morcellement des parcelles. L'investissement en matière de machines agricoles requises pour la préparation du sol, du semis, etc., est rendu difficile par cette situation.

Exigences et choix des techniques d'implantation de la betterave monogerme

Il n'existe pas de règle absolue pour le choix de techniques d'implantation de la betterave monogerme. En effet, ce dernier sera dicté par les possibilités existantes et les conditions climatiques. Les techniques actuelles évoluent pour concilier simplification, gain de temps et qualité de la structure. En règle générale, tout choix d'outils doit respecter les exigences spécifiques de la culture telles que citées ci-après et tenir compte des caractéristiques du sol et des conditions climatiques de la région. Dans tous les cas, il y a lieu de veiller à répondre aux éléments suivants:

  • La maîtrise du labour, de la préparation du lit de semences et du semis;
  • La maîtrise de la fertilisation;
  • La disponibilité en eaux d'irrigation, particuliè- rement pour la pré-irrigation des parcelles et juste après le semis;
  • Les traitements herbicides et pesticides et la disponibilité du matériel d'application de ces produits;
  • La date et les procédés de récolte.

Préparation du sol

Les travaux de préparation du sol ont pour objectifs fondamentaux, d'une part de réussir une germination et une émergence rapide et régulière des graines, et d'autre part de permettre un enracinement profond. Ils doivent donc aboutir à une bonne structure superficielle tout en conservant la structure profonde réalisée par le labour. Ces travaux doivent être raisonnés dès la récolte du précèdent tout en recherchant des façons culturales soignées et un lit de semences bien nivelé. Ceci exige un choix judicieux des outils de préparation du sol et que chaque intervention soit réalisée dans des conditions de sol optimales.

Date de labour

La date de labour pour l'implantation d'une culture telle que la betterave doit être raisonnée dès la récolte du précèdent. En effet, elle a une influence directe sur la qualité du labour, particulièrement, la facilité d'exécution des travaux de préparation superficielle du sol qui font suite au labour et une certaine influence sur le rendement des récoltes ultérieures. Ainsi, elle doit être positionnée de façon qu'elle participe pleinement à la réalisation de la structure du sol attendue à l'automne.

Dans le cas des périmètres betteraviers du Maroc, les labours précoces, juste après la récolte, sont à conseiller dans la mesure ou les sols sont encore humides et faciles à travailler. La reprise de ces labours en automne est d'autant plus aisée que le sol aura été sujet à une forte activité structurale liée aux effets climatiques (fragmentation des mottes).

Intérêt de la pré-irrigation

Lorsqu'il n'est pas possible de procéder à un labour précoce, la pré-irrigation offre un intérêt majeur dans la préparation du sol et représente une pratique qu'il faut encourager, notamment dans les sols secs. En effet, celle-ci permettra les avantages suivants:

  • Faire germer les semences d'adventices;
  • Faciliter la reprise des terres avec notamment une économie d'énergie et une usure moindre des outils;
  • Obtenir un meilleur émiettement.

Le labour

La racine pivotante de la betterave exige une structure homogène. En conditions normales (pas de semelle de labour, terre non dégradée), le labour profond se fait sur une grande profondeur d'environ 25 à 35 cm afin de faciliter la croissance sans déformation des racines. En effet, plus que d'autres plantes, la betterave est très sensible à la qualité de la structure des horizons profonds du sol. Les tassements ont pour conséquence une moindre prospection racinaire et une difficulté de croissance de la plante située à l'aplomb de la zone compactée. Le pivotement de la betterave est par ailleurs sensible aux hétérogénéités de structure, donc aux alternances de zones fragmentées et de zones plus massives qui entraînent l'apparition de racines fourchues. Dans la mesure du possible, il convient d'éviter:

  • Les labours irréguliers ou grossiers qui sont ensuite difficiles à niveler (sol trop sec);
  • Les bandes de terres compactées ou lissées qui peuvent parfois se révéler difficiles à ameublir ultérieurement (sol très humide et risque de tassement excessif);
  • Les bandes de terre insuffisamment retournées, qui favorisent la levée rapide des mauvaises herbes.
  • Les labours très profonds qui remontent en surface la terre du sous-sol, dépourvue d'humus.

Préparation du lit de semences

Plusieurs recherches s'accordent sur le fait que la structure du lit de semence d'une culture betteravière doit offrir un profil cultural tel qu'illustré par la Figure 1 (voir fichier PDF). Le lit de semence devra permettre un placement optimal de la graine par le semoir; à savoir:

  • Une graine placée à 2 - 3 cm sous la surface du sol, 4 cm étant la limite. Cette couche de sol devra en effet être traversée par la tigelle dont les capacités de croissance à l'obscurité sont limitées physiologi- quement. La graine ne doit pas également être placée trop superficiellement pour ne pas risquer une dessiccation en cas de sécheresse.
  • Lors de la préparation, l'épaisseur de la couche travaillée ne doit pas être trop importante. Ceci afin de permettre aux éléments de plombage du semoir de réaliser le tassement favorable à la remontée d'eau par capillarité. Le travail du semoir est d'autant plus facilité que la profondeur du lit de germination est régulière.
  • La partie inférieure du lit de semence devra présenter une bonne continuité avec l'horizon sous-jacent, ce qui assurera une alimentation correcte en eau et surtout ce qui évitera des accidents de pivotement et des fourchages.

Pour aboutir au lit de semence tel qu'illustré par la Figure 1 (voir fichier PDF), il est nécessaire d'envisager l'introduction de nouvelles techniques (outils de préparation du lit de semences) pouvant mieux répondre aux exigences de la culture de la betterave dans les différents périmètres betteraviers du Maroc.

En cas d'un labour précoce, lorsque ce dernier a peu évolué sous l'action du climat, la préparation superficielle doit être énergique et concernera généralement une profondeur de 10 cm. Des outils animés par la prise de force sont suggérés dans ce cas pour améliorer l'état d'affinement du sol, notamment la herse rotative (Figure 2, (voir fichier PDF)). Plusieurs critères favorisent l'emploi d'un tel outil, entre autre:

  • L'efficacité dans la destruction des mottes durcies provenant de labours d'automne réalisés dans de mauvaises conditions d'humidité (état sec). L'émiettement recherché est en général obtenu.
  • L'ameublissement sur une profondeur plus grande, ce qui pour la betterave, favorise un bon développement du pivot et par voie de conséquence contribue directement à l'élaboration de son rendement.
  • La possibilité de la combinaison de cet outil avec un rouleau ou une herse de même largeur permet une économie d'énergie et atténue le tassement par les roues du tracteur.

Notons que pour les sols battants et sensibles, les herses rotatives ne sont pas à préconiser. Dans de tels types de sols, il y a lieu d'assurer un rappuyage du sol tout en préservant en surface des petites mottes. Cet état de surface peut être obtenu par le passage d'une combinaison d'outils associant par exemple sur le même bâti des dents droites ou dents vibrantes et un rouleau cultipacker ou une herse à cages (Figure 3, (voir fichier PDF)).

Afin d'obtenir une bonne régularité de la levée, le lit de semence doit être bien nivelé. Le tassement du lit de semences est assuré par un ou deux passages d'un rouleau avant de réaliser le semis (Figure 4, (voir fichier PDF)). Cet outil aura pour fonction de tasser le lit de semences dans sa partie superficielle, limitera les hétérogénéités de profondeur du lit de semences et assurera une bonne circulation de l'eau non saturante des couches inférieures plus humides.

En cas de pluie, il est primordial d'attendre le ressuyage du sol. Le risque d'accidents de structure (compactage, semelles de préparation) est d'autant plus grand que l'humidité du sol en surface ou en profondeur est importante.

Le semis

En règle générale, le semoir choisi doit permettre de réaliser la préparation du sol définitive, en produisant de la terre fine et en réaménageant la structure superficielle autour de la graine. Il doit offrir un système de contrôle de la profondeur fiable. Par exemple, pour suivre les irrégularités du sol, le montage de l'élément semeur sur "parallélogramme" est un procédé permettant d'assurer sa stabilité et son indépendance. Le tassement localisé de la semence pourrait être assuré par une roue plombeuse fixée juste derrière l'organe ouvreur. Notons, cependant que pour chaque type de sol, il faut rechercher la combinaison d'organes la plus appropriée.

Le semis à plat

Les semoirs actuels sont équipés d'une très large gamme de systèmes d'enterrage. Les constructeurs de ce type de matériel proposent diverses combinaisons d'éléments composés de chasse-mottes, rouleaux, roues, herses, griffes, socs en étrave, et socs piocheurs (Fig. 5, (voir fichier PDF)).

En général, pour le cas de la betterave monogerme, un semoir doit essentiellement répondre à deux objectifs:

  • Assurer une levée rapide et homogène, rôle des organes de mise en terre, de plombage et de recouvrement;
  • Assurer une répartition régulière et précise des graines qui doivent, tant pour les nues que pour les enrobées, se prêter parfaitement à cette opération.

Deux grandes catégories de semoirs monograines sont offerts sur le marché, notamment:

Les semoirs équipés de distributeurs mécaniques exigent une qualité de présentation de la graine plus élevée que ceux à distributeurs pneumatiques. Par contre, ils sont généralement plus précis, surtout pour ceux d'entre eux qui possèdent des rotors animés d'une rotation rapide. On leur réserve l'utilisation des graines enrobées.
Les semoirs pneumatiques, généralement choisis pour leur polyvalence, peuvent utiliser des graines plus irrégulières et permettent généralement de semer sans difficulté des graines nues. La vitesse d'avancement a également une influence sur la régularité du semis: Plus le distributeur est animé d'une rotation lente, plus une vitesse d'avancement élevé du semoir aura tendance à détériorer la régularité du semis. En général, on préconise une vitesse de travail variant entre 5 à 7 km/h selon le type de semoir et la qualité de la préparation du lit de semence.

Le semis sur billons ou sur planches

Pour répondre aux problèmes posés par l'irrigation gravitaire au niveau de certains périmètres, entre autres une conduite difficile de l'irrigation, un écoulement de l'eau hétérogène au niveau parcellaire, un transport du sol et des semences, et un risque de formation de croûtes de battance, l'APPSG, l'ORMVAG, l'AMSP et la SUNABEL ont financé une étude ayant pour objectif de développer des techniques de semis mécaniques sur billons ou sur planches "Association Semoir-Billonneur". Pour sa phase de réalisation et d'expérimentation, cette étude a été confiée au Département de Machinisme Agricole de l'Institut Agronomique et Vétérinaire Hassan II. La phase d'industrialisation a été conduite en étroite collaboration entre l'IAV Hassan II et la Compagnie Marocaine Industrielle et Commerciale. Cette machine permet de réaliser en un seul passage du tracteur la confection de billons ou de planches et l'opération de semis sans altérer le lit de semence en remontant ou rejetant des mottes ou de la terre sur les lignes de semis. De même, selon le type de culture envisagée, l'association du billonneur au semoir offre la possibilité de semer soit en lignes jumelées, soit en lignes simples (Figure 6, (voir fichier PDF)).
Dans le périmètre irrigué du Loukkos, certains agriculteurs betteraviers confectionnent sur leurs parcelles des planches d'environ 1,10 m de largeur par l'intermédiaire de deux corps billonneurs montés sur une barre porte-outils. Du fait de cette largeur, un semoir équipé de trois éléments semeurs peut réaliser un semis de trois lignes espacées chacune de 35 cm sans pour autant détruire la planche. Notons toutefois que les rigoles ainsi confectionnées ne sont pas destinées à l'irrigation gravitaire, mais au drainage superficiel de la parcelle. De même, cette technique nécessite deux passages du système tracteur-outil pour réaliser les opérations de billonnage et de semis. Ceci engendre un tassement double du sol et augmente les coûts de production (carburant et main d'œuvre). Enfin, l'espacement réduit des trois lignes de semis complique les opérations de traitement phytosanitaire, particulièrement lors d'un feuillage dense.

La fertilisation

La betterave à sucre, multigerme ou monogerme, est une plante qui se distingue des autres, par une grande consommation en éléments minéraux notamment l'azote, le potassium et le phosphore. En effet, une récolte de betterave à sucre prélève par tonne de racines 4 à 4,5 kg d'azote ; 1,5 à 2,5 kg de phosphore et 6 à 7 kg de potassium. Cependant, l'enfouissement des feuilles et des collets au sol restitue à ce dernier par tonne de racines récoltées 1,75 à 2,5 kg d'azote ; 0,5 à 1,25 kg de phosphore et plus de 2,5 kg de potassium. Toutefois, les besoins de la betterave en éléments minéraux, dépendent du niveau de production escompté.

La fertilisation azotée

La fertilisation azotée joue un rôle déterminant dans la production de la betterave à sucre. Elle a un effet non seulement sur le rendement racine, mais également sur la valeur technologique de la matière récoltée. En effet, la fumure azotée fait augmenter le poids des racines et celui du bouquet foliaire, augmente la teneur en éléments mélassigènes et diminue la teneur en sucre extractible.

La technique de fertilisation azotée reste difficile à maîtriser du fait que l'efficacité des engrais azotés dépend des conditions pédoclimatiques au cours de la période de croissance de la plante, de la dose utilisée, du mode ainsi que des dates d'apport.

Afin d'assurer une bonne nutrition azotée de la culture, il est nécessaire de connaître le besoin total et le rythme d'absorption d'azote. Le premier point permet de fixer la dose optimale d'azote à apporter, compte tenu des quantités fournies par le sol; le second d'en déduire les meilleures époques d'apport.

Plusieurs travaux de recherches ont été entrepris dans différents périmètres betteraviers afin de déterminer la dose optimale d'azote permettant l'obtention du meilleur rendement, aussi bien qualitatif que quantitatif. Les résultats de ces travaux sont résumés dans le tableau 1 (voir fichier PDF). Il en ressort que la dose d'azote optimale à recommander aux agriculteurs n'est pas la même pour tous les périmètres betteraviers. Ceci est lié aux conditions pédoclimatiques de chaque périmètre. Par ailleurs, la dose optimale d'azote dépend de la durée du cycle, de son emplacement dans l'année et du précédent cultural. Aussi, nous avons montré que cet optimum dépend, également, de l'équilibre de l'azote avec d'autres éléments fertilisants notamment le potassium. La dose optimale d'azote à recommander est de 240 à 300 U/ha dans les Doukkala et Tadla, de 170 à 290 U/ha au Gharb et de 320 U/ha à la basse Moulouya.

Pour conduire une culture vers le résultat souhaité aussi bien en quantité qu'en qualité, il est nécessaire de moduler les apports d'azote de manière à optimiser la photosynthèse durant les différentes phases du cycle végétatif et à réduire les pertes d'azote par réorganisation et par lixiviation. Par ailleurs, les dates d'apport et les fractionnements doivent être adaptés de façon à obtenir la meilleure adéquation disponibilité-besoins.

Le fractionnement des apports azotés permet de limiter les fortes concentrations de l'azote dans la solution du sol et de retarder sa migration en profondeur. Il favorise également un meilleur ajustement des conditions du sol aux exigences instantanées des plantes et permet de réduire le potentiel de lixiviation.

Dans le but de déterminer les meilleurs fractionnements possibles, plusieurs travaux de recherche ont été réalisés par différents auteurs et dans différentes localités. Les résultats de ces travaux sont synthétisés dans le tableau 2 (voir fichier PDF). Ces résultats montrent que dans tous les périmètres betteraviers du Maroc, les fractionnements qui consistent à apporter au moins le 1/4 de la dose d'azote au semis permettent l'optimisation de tous les paramètres de croissance et de développement et par conséquent l'optimisation du rendement aussi bien en racine qu'en sucre. Par ailleurs; il a été bien montré que l'apport d'une forte quantité d'azote en fin de cycle favorise l'accumulation des éléments mélassigènes dans la râpure et diminue ainsi la teneur en sucre extractible. Il en ressort alors que les fractionnements qui n'apportent pas d'azote au semis et qui consistent à augmenter la fraction apportée en fin du cycle sont les plus néfastes pour la qualité technologique de la betterave à sucre.

La fertilisation potassique

La betterave sucrière présente des besoins élevés en potassium, et en cas de carence en cet élément, le développement de la racine se trouve nettement plus affecté que celui de la partie aérienne. La betterave à sucre, plante productrice d'hydrates de carbone, est en effet sensible à cet élément étant donné le rôle qu'il joue dans la synthèse de ces hydrates de carbone et dans leur transfert vers le lieu de stockage. Plusieurs travaux de recherches ont montré que le potassium affecte positivement le rendement racine et la qualité technologique de la betterave à sucre. En effet, le potassium entraîne une diminution de la teneur de sodium et de l'azote alpha aminé dans la râpure, ce qui améliore la teneur en sucre extractible. Les exportations en potassium sont d'autant plus importantes que les rendements racines sont élevés. En effet, le rendement racine augmente avec l'addition du potassium, vu le rôle bénéfique de ce dernier dans la translocation des hydrates de carbone de la partie aérienne vers le pivot, et par la suite dans l'édification de la partie souterraine. C'est pour cette raison qu'à la récolte, la grande partie du potassium absorbée se trouve au niveau du pivot (2/3). Les exportations de la betterave peuvent atteindre 800 Kg de K2O/ha. En effet, les travaux de recherches conduits dans les périmètres betteraviers marocains ont montré que:

  • - Les quantités de potassium exportées par la betterave sont corrélées aux niveaux du rendement en racine (r² = 0,60).
  • Les exportations moyenne en Kg K2O par tonne de racine oscillent autour de la valeur 6,5.

Cependant des variations inter-régionales et intra-régionales ont été observées. Cette variabilité peut s'expliquer par les effets liés au sol (notamment sa richesse en potassium), à la plante et aux conditions climatiques.

La fertilisation potassique a fait l'objet de plusieurs recherches visant, entre autres, la détermination de la dose optimale de potassium, permettant de maximiser les rendements en racine et en sucre à l'hectare. Ces recherches ont montré que dans la plupart des périmètres betteraviers, sauf celui des Doukkala où les réserves des sols en potassium sont faibles, les quantités de potassium à apporter dépendent étroitement de la richesse du sol en cet élément. En effet, de nombreux auteurs (Tableau 3, (voir fichier PDF)) ont rapporté que sur les sols des Doukkala, à richesse en potassium faible à moyenne, l'apport croissant du potassium engendre des augmentations du rendement en racine comprises entre 9 et 30% du témoin (sans apport de K+). La dose optimale de potassium se situe à 300 kg K2O/ha. Par contre dans les autres périmètres, l'effet des apports croissants sur le rendement demeure négligeable, parfois nul; ce qui indique que les sols de ces régions sont bien pourvus en potassium. En effet, Les teneurs moyennes en potassium dans ces sols sont de 420, 540 et 740 mg/kg de sol respectivement au Tadla, Gharb et la basse Moulouya. Selon les normes d'interprétation étrangères établies dans des conditions proches à celles du Maroc, et considérant 150 mg/kg comme seuil critique, il s'est avéré que 98% des sols du Tadla sont riches en potassium (EZEKARI et BOUKHAL, 1990). D'après l'abaque d'AÏT HOUSSA (1989), la réponse aux apports potassiques n'est pas appréciable au delà des teneurs en K2O du sol supérieures à 212 mg/kg.

La fertilisation phosphatée

Chez la betterave à sucre, la fumure phosphatée joue un rôle bénéfique sur la croissance racinaire et sur l'absorption de l'azote et le potassium. Contrairement à l'azote, le phosphore même à des doses élevées, influence positivement la teneur en sucre et la pureté du jus en abaissant le taux de l'azote alpha-aminé dans la râpure. De plus, une bonne alimentation en phosphore permet une meilleure résistance à la sécheresse en favorisant l'implantation du système racinaire. Le phosphore agit également sur les caractéristiques morphologiques du système racinaire, à savoir l'élongation et l'augmentation du diamètre moyen des racines.

Les résultats des quelques travaux de recherches conduits au Maroc, dans le but de déterminer la dose de phosphore permettant l'obtention du meilleur rendement en racine et en sucre, sont rapportés dans le tableau 4, (voir fichier PDF).

Ces résultats montrent que la dose optimale de phosphore n'est pas la même pour tous les périmètres betteraviers. Ceci est lié à la différence de richesse du sol en cet élément. La dose recommandée est en moyenne de 83 U/ha, 100 U/ha, 120 U/ha et 160 U/ha respectivement au Doukkala, au Gharb, au Tadla et à la basse Moulouya.

Fertilisation boratée

Plusieurs oligo-éléments sont nécessaires pour le développement de la betterave à sucre. Cependant, le bore demeure l'élément le plus important pour cette culture. En effet, une carence en cet oligo-élément provoque l'apparition de la maladie dite "pourriture du cœur noir" de la betterave. Il en résulte par la suite un mauvais développement du bourgeon terminal puis sa destruction, ce qui engendre une réduction de la productivité, aussi bien quantitative que qualitative de la culture. Un apport préventif de 2 à 3 kg de bore par hectare ou une application foliaire à mi-saison peut éviter l'apparition d'une telle carence.

L'irrigation

Les besoins en eau d'une culture sont définis comme étant la quantité d'eau nécessaire pour satisfaire l'évapo- transpiration maximale (ETM) d'une culture saine, dans des conditions d'alimentation en eau non limitantes. Ces besoins sont soit mesurés directement en station expérimentale, soit calculés en multipliant l'évapotranspiration potentielle par le coefficient cultural (Kc).

Les études menées dans différents périmètres betteraviers montrent que pour un semis d'automne, la culture de betterave consomme 8 à 10 mm d'eau par tonne de racines récoltées. Autrement dit, une betterave évaporant 600 mm produira 60 Tonnes de racines, tandis que pour un cycle long, pendant lequel la même culture consomme 800 mm conduira à une production de 80 tonnes. Cependant, la consommation maximale en eau d'une betterave ayant un cycle de 250 jours, s'étalant de fin Octobre à fin Juin s'élève à 880 mm en année climatique favorable.

En général, l'évapotranspiration se caractérise par de fortes fluctuations inter-annuelles qui sont liées à des variations climatiques importantes. Ainsi, l'évapo- transpiration diminue généralement depuis Septembre jusqu'à Janvier et Février, après quoi elle augmente et atteint un maximum vers les mois de Juin et Juillet.

L'irrigation totale d'une culture de betterave est très variable. En effet, plus on sème tardivement, plus le cycle végétatif s'étale dans les périodes sèches et plus les besoins en eau d'irrigation augmentent. Ce sont alors les semis tardifs qui sont les plus exposés au déficit hydrique. La dose d'irrigation totale dépend également de la date de récolte et de la répartition des pluies dans l'année. Comme ordre de grandeur, on peut dire que la culture de betterave consomme 70 mm pour produire une tonne de sucre pour un semis de mi-Octobre contre 90 mm pour un semis de mi-Décembre.

La stratégie à adopter pour la conduite de l'irrigation de la betterave à sucre consiste à cibler les irrigations de complément aux précipitations sur les phases les plus sensibles de la culture.

Etablissement et pré-tubérisation

L'apport d'eau pendant cette phase vise non seulement à satisfaire la consommation en eau de la plantule, mais aussi à réhumecter le sol pour assurer une bonne levée. Une irrigation complémentaire aux pluies, appliquée juste après le semis, assure un bon démarrage de la culture et par conséquent un bon développement du peuplement.

Début de la tubérisation

Pour les semis précoces, cette phase coïncide avec la période pluvieuse (de Janvier à Mars) et il est donc rare d'avoir recours à l'irrigation, excepté pour les semis de Décembre qui nécessitent une irrigation en Mars.

Pleine tubérisation

Pendant cette phase, une bonne alimentation hydrique est à assurer étant donné que les racines sont en phase de grossissement intense. A titre d'exemple, dans les Doukkala, le nombre d'arrosages pendant cette période peut varier de 3 à 5 selon la précocité du semis.

Maturation

L'allongement de la période culturale sous irrigation entraîne certes une augmentation du rendement en poids des racines de la betterave à sucre. Cependant, il n'en est pas de même pour la teneur en sucre. En ce sens, l'expérience marque l'intérêt de suspendre les arrosages 15 à 20 jours avant la récolte de manière à favoriser la migration des sucres de la partie aérienne des betteraves vers la partie racinaire. Néanmoins, il est déconseillé de suspendre les arrosages plus de 45 jours avant la récolte. En effet, si l'irrigation s'arrête trop tôt, non seulement le rendement en sucre diminue, mais aussi, la qualité des racines se détériore par l'augmentation de la teneur en éléments mélassigènes.

Le désherbage

La présence de mauvaises herbes ou plantes adventices dans une parcelle de betterave peut être nuisible à plusieurs titres. En effet, la compétition pour l'eau, les éléments minéraux et la lumière affecte directement la croissance et le développement de la culture ainsi que son rendement ultérieur. De ce fait, depuis l'introduction de la betterave à sucre au Maroc, la lutte contre les mauvaises herbes a toujours été recommandée pour réussir cette culture. Toutefois, les désherbages manuels et les techniques culturales ont souvent constitué les méthodes de lutte les plus généralement utilisées par les agriculteurs. En effet, à l'exception de certaines grandes exploitations, le désherbage chimique n'a été introduit que timidement dans la conduite de la betterave sucrière à l'échelle nationale.

La réussite de l'installation de la culture de betterave de type monogerme exige un programme de contrôle des mauvaises herbes à base de produits chimiques efficaces. Au Maroc, on dispose actuellement de plusieurs matières actives ou mélanges de matières actives performantes pour faire face aux diverses situations envisagées ou présentes (Tableau 5, (voir fichier PDF)).

Les traitements phytosanitaires

La culture de la betterave à sucre est continuellement menacée par des ravageurs et sujette à des maladies depuis le semis jusqu'à la récolte, et qui peuvent affecter une ou plusieurs composantes de son rendement. En effet, ils peuvent entraver sa croissance, réduire les réserves qu'elle accumule dans sa racine et contribuent parfois à ouvrir la voie à d'autres organismes qui s'installent sur des tissus déjà atteints, aggravant ainsi les dégâts. Les symptômes et dégâts des principaux ravageurs et maladies de la betterave à sucre au Maroc ainsi que les moyens de lutte sont donnés dans le tableau 6 (voir fichier PDF).

La récolte

La date de récolte de la betterave n'est pas définie par un stade de maturité physiologique, mais cette culture est plutôt récoltée quand sa production en sucre est optimale. La maturité de la betterave, qui se traduit par le jaunissement des feuilles, est difficile à apprécier avec précision. Aussi, la date de récolte de la betterave est bien plus déterminée par les exigences de travail, la possibilité de livraison à la sucrerie ou la libération du sol, que par la maturité physiologique.

Les travaux de recherches menés dans différents périmètres betteraviers marocains montrent que la phase de maturation de la betterave doit être la plus ensoleillée que possible et suffisamment longue, sans toutefois être exagérée. D'une manière générale, la teneur en sucre dans la racine suit une courbe en cloche: elle est trop faible en avril-début mai, acceptable en fin mai, bonne en juin, élevée en juillet, tandis qu'elle décroît en août. Par conséquent, le fait de retarder la récolte s'avère néfaste pour le rendement et surtout pour la qualité technologique de la betterave. En effet, les betteraves récoltées en août sont moins riches en sucre que celles arrachées en juillet, à cause des hautes températures estivales qui font chuter leur teneur en sucre.

Le poids des racines augmente considérablement jusqu'à la première quinzaine de juillet, se traduisant par un gain de rendement racine par jour de 0.4 T/ha. Par la suite, la diminution devient forte, surtout en août. Il en est de même pour la pureté du jus qui est satisfaisante à partir du mois d'avril jusqu'à la première quinzaine de juillet. D'une manière générale, si la récolte n'est pas faite à ce moment là, la racine continue de respirer sans photosynthétiser et perd ainsi de son poids et de sa richesse en sucre, et ceci est d'autant plus accentué que la température est élevée.

Aussi, une fois récoltées, les racines de la betterave sucrière peuvent subir sous l'action du climat, généralement chaud à la période de la récolte, des transformations plus ou moins préjudiciables à leur aptitude technologique et à la production en sucre. Ainsi lorsque la durée de stockage des betteraves en plein champ augmente, elle se traduit par une chute de poids des racines et une détérioration assez remarquable de la qualité technologique.

Stratégie pour le développement de la betterave monogerme

Il existe au moins deux contraintes majeures qui doivent nous inciter à réfléchir et développer des techniques appropriées pour mécaniser la culture de la betterave. Ces contraintes peuvent devenir de véritables freins au développement et à la réussite de cette spéculation dans notre pays.

Si le secteur sucrier veut continuer à assurer une production permettant de contribuer à la sécurité alimentaire du pays, il est temps de procéder à une large extension, voire même une généralisation de la monogerme qui demeure jusqu'à preuve du contraire la voie de l'avenir. En effet, tous les efforts techniques et technologiques en matière de recherches et d'améliorations variétales sont portés sur la semence monogerme. Au niveau international, l'utilisation de la betterave polygerme est limitée à de très rares pays et à de très faibles superficies.

L'avenir est donc pour la monogerme dont les performances, quand elle est conduite comme une nouvelle technologie, sont supérieures à celles de la polygerme. Aussi, les disponibilités à l'avenir des semences polygermes risquent d'être réduites ou que ces variétés ne présenteraient pas les caractéristiques recherchées, par exemple, en terme de résistance à certains parasites ou maladies. Il est donc impératif de préparer l'avenir en intégrant dans le secteur betteravier les nouveaux produits génétiques.

La cherté et la rareté de la main d'œuvre de plus en plus ressentie par les agriculteurs dans les différents périmètres betteraviers et surtout en période de forte demande( installation, entretien et récoltes).

Quand les semences monogermes ont été introduites en grande culture au Maroc, les superficies consacrées à ce type de culture ont évolué rapidement pour subir par la suite une régression importante.

L'engouement observé au départ pour ce type de culture trouve son explication dans les facteurs suivants:

  • un encadrement intensif accordé aux agriculteurs utilisant les semences monogermes. En effet, toute l'opération de la betterave monogerme a été totalement prise en charge par les ORMVA et après leur désengagement par les sucreries.
  • les prix de facturation appliqués résultent d'une péréquation avec la multigerme y compris les semences.
  • les résultats des premiers essais ont été très encourageants.
  • une sensibilisation réussie auprès des agriculteurs quant aux avantages de ce type de semence.

Dans une perspective de re-dynamisation de la vulgarisation de la culture de la betterave monogerme en vue de sa généralisation et pour lui assurer un développement continu et durable, la recherche sur l'optimisation des techniques de production de ce type de culture doit être poursuivie ainsi que les efforts de mécanisation qui seront entrepris doivent tenir compte et des aspects techniques et des aspects organisationnels. Aussi, des mesures d'accompagnement doivent être décidées pour encourager cette opération. Les aspects techniques doivent concerner toutes les interventions qui visent l'obtention d'un peuplement optimum, une meilleure protection phytosanitaire et un bon entretien de la culture et une bonne récolte qui préserve aussi bien la quantité que la qualité de la matière première.

Si le gros matériel peut convenir facilement aux grands domaines, des solutions adaptées aux petites exploitations qui sont majoritaires peuvent être recherchées. Toute solution technique proposée doit tenir compte des conditions pédoclimatiques de région et du type d'irrigationpratiqué.

La prédominance des petites parcelles betteravières constituent une contrainte majeure à l'introduction du gros matériel. Pour contourner cette limite il y a lieu de promouvoir la création de petites et moyennes entreprises (jeunes promoteurs) qui prendraient en charge tous les travaux que nécessitent la conduite de la betterave monogerme. Les associations régionales de producteurs de betterave peuvent aussi se doter de matériel et outils adaptés aux exigences de la betterave monogerme.

La maîtrise des aspects techniques et organisa- tionnels n'est pas suffisante pour garantir, à l'avenir, un développement total de la monogerme. D'autres mesures de support et d'accompagnement doivent être prises. On peut citer:

  • le renforcement des structures de recherche et de vulgarisation et la mise en place d'un programme national de recherche sur la betterave monogerme en général et sa mécanisation en particulier.
  • le renforcement de l'encadrement et la formation. Cette action sera réalisée à travers l'organisation d'un programme de formation sur la conduite de la betterave monogerme, destiné à deux groupes cibles: agriculteurs et fils d'agriculteurs et inspecteurs et agents d'encadrement, des journées de sensibilisation et des voyages d'études pour les agriculteurs réticents ou non encore acquis à la culture de la betterave monogerme. La formation ne devra pas se limiter qu'aux techniques de production, mais aussi au réglage du matériel, à son utilisation et son entretien.
  • l'établissement de conventions de partenariat entre les différents intervenants dans la filière sucrière y compris les petites et moyennes entreprises de travaux agricoles. En plus des banques, les sucreries peuvent mettre à la disposition des jeunes promoteurs le financement nécessaire pour l'acquisition du matériel approprié et les ORMVA leur assurent les moyens logistiques.
  • les sucreries, en tant que bénéficiaires de toutes les actions, doivent contribuer dans la promotion de la mécanisation et, par la même, au développement de la betterave monogerme. Aussi, il est possible d'envisager l'instauration d'une prime pour les betteraviers qui ont opté pour la culture de la monogerme.
  • l'organisation professionnelle du matériel doit veiller au bon choix des outils nouveaux et adaptés aux conditions marocaines, participer aux essais de démonstration et assurer les pièces de rechange nécessaires.

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Source : www.vulgarisation.net - www.legume-fruit-maroc.com